Sainte Jeanne de Valois, reine et veuve, 23 avril 1464 – 4 février 1505
Appelée encore Jeanne de France, Jeanne est la seconde fille (après Anne de Beaujeu) de Louis XI et de Charlotte de Savoie. Jeanne naquit le 23 avril 1464 à Nogent-le-Roi au château de Pierre II de Brézé, et fut fiancée à son cousin Louis d’Orléans qui a 2 ans, un mois plus tard. Le mariage fut célébré en 1476.
Paul II succédant à Pie II pape, Frédéric III empereur du saint Empire romain germanique et Louis XI son père roi de France.
La vie cahotée de Jeanne de France déroulée, presque entière, en l’apparat des cours – trente-six ans dans le monde, et quatre ou cinq dans une demi-clôture – semblerait n’appartenir qu’à l’histoire ; mais ses souffrances ajoutent à son intérêt et à sa grandeur.
Le XVe siècle, où elle vécut, élégant et tumultueux, moins religieux et moins artiste que le moyen âge, et mois littéraire aussi que la période suivante de Marot, de Ronsard et de la Pléiade, de Montaigne, Rabelais et saint François de Sales, marqua son style, mais agit peu sur son tempérament.
Divers personnages ont, au contraire, tracé et commandé sa route. Son père, le premier, le roi Louis XI. Il se débarrassa de son éducation, n’essaya point d’amoindrir ses infirmités, la frustra de toute tendresse, et par une décision tyrannique, suscita ses malheurs. Quels blâmes, ou quelles louanges, lui prodiguent les historiens, selon qu’ils considèrent les procédés, retors et cruels, de l’homme “ fertile en dangereux détours ”, ou les insignes services du roi. Mais c’est méprise et injustice d’isoler ses défauts, qui l’aidèrent en des passes difficiles.
Jeanne était boiteuse, bossue dès l’âge de 5 ans, mariée malgré elle à douze ans à un prince fut exclue de la cour. Son frère, Charles VIII, était devenu roi à la mort de Louis XI. A la mort de celui-ci en 1498, le mari de Jeanne accède au trône de France sous le nom de Louis XII. Louis XII, qui l’avait en aversion ne la regarda jamais comme son épouse. Dès son avènement, il s’empresse de faire annuler son mariage avec Jeanne, prétextant que celui-ci n’avait jamais été consommé. En vérité il était question pour lui d’affermir sa légitimité au trône en épousant la veuve de son prédécesseur, Anne de Bretagne, ce qui était également un moyen d’annexer le riche duché de Bretagne. Après un procès d’un tribunal ecclésiastique ouvert à la cathédrale Saint-Gatien de Tours le 10 août 1498 et qui invoque un mariage contraint et consanguin, le défaut d’âge lors du mariage et qu’elle était inapte à « recevoir la semence virile », le mariage est finalement cassé le 17 décembre par la bulle papale[ ]d’Alexandre VI Borgia pour non consommation.
[.« Que Dieu soit glorifié, dit alors la Sainte, mes chaînes sont brisées ; c’est Lui qui l’a voulu, afin que désormais je puisse mieux Le servir que je ne l’ai fait jusqu’ici. » Leur union avait duré vingt-deux ans.
Fille de Louis XI, Jeanne a exercé ses responsabilités avec une opiniâtre recherche du bien public.]
Elle était toute laide et contrefaite ; mais, en revanche, le Ciel révéla en elle, dès ses plus tendres années, une âme d’élite. Sa piété envers la sainte Vierge marquait son âme du sceau des prédestinés : elle avait cinq ans lorsque la Mère de Dieu daigna lui apprendre qu’elle était appelée à fonder en son honneur un Ordre dont le but principal serait l’imitation de ses vertus.
Ses adieux au roi furent touchants : « Je vous dois, dit-elle, une grande reconnaissance, puisque vous me retirez de la servitude du siècle. Pardonnez-moi mes torts ; désormais ma vie se passera à prier pour vous et pour la France. »
Jeanne se retira alors à Bourges, en 1500, Jeanne de Valois avait un caractère difficile, facilement tyrannique. Elle lutta contre son tempérament toute sa vie.
Dès lors la prière devint la compagne inséparable de sainte Jeanne. Son ardent amour pour Jésus-Christ lui fit embrasser les mortifications volontaires, et plus d’une fois on la vit, à genoux au pied d’une Croix, se frapper la poitrine avec une pierre et répandre un torrent de larmes, à la pensée de ses péchés et des souffrances de Jésus-Christ. Quelques herbes mal apprêtées suffisaient à sa nourriture ; elle jeûnait et prolongeait ses veilles, ses prières trois jours au moins par semaine.
Consoler les pauvres, les servir à table, laver et baiser leurs pieds, voilà quelles étaient les occupations chères à son cœur. Son humilité aurait voulu cacher à tous les yeux les prodiges de sa charité. Elle n’aurait désiré que Dieu seul pour témoin, car elle ne cherchait que Lui dans la pratique de toutes les vertus.
L’Eucharistie était sa force mystérieuse ; elle ne La recevait jamais que toute baignée de larmes, et c’est au pied du Tabernacle qu’elle trouvait tous les trésors de dévouement qu’elle prodiguait autour d’elle. Elle put en 1502, (fidèle à sa promesse d’enfant d’honorer la Mère de Dieu), avant sa mort sur les conseils de St François de Paule (fondateur de l’ordre des Minimes) et malgré de nombreuses oppositions, fonder l’Ordre des Annonciades.
Européen bien avant l’heure, l’ordre atteindra son apogée juste avant la Révolution, avec 50 monastères, en France, en Allemagne et en Belgique.
Sainte Jeanne mourut le 4 février 1505, à l’âge de quarante ans, Jules II étant pape, Maximilien Ier empereur du saint Empire romain germanique et Louis XII roi de France.
Une clarté extraordinaire parut pendant plus d’une heure dans sa chambre, au moment de sa mort. On trouva son corps couvert d’un rude cilice sur sa chair nue, avec une chaîne de fer sur ses reins ; c’est pas ces instruments terribles de la pénitence chrétienne qu’elle avait remplacé les joyaux de la couronne royale. Son culte établi de temps immémorial fut approuvé par Benoît XIV qui la déclara Bienheureuse le 18 juin 1742, Pie VI étendit son culte à toute la France le vingt avril 1775 et Pie XII la canonisa le 28 mai 1950.
Dès que le bourdon de la cathédrale eut répandu son glas, la ville de Bourges interrompit les réjouissances du carnaval, et Louis XII, qui relevait de grave maladie, s’émut à la pensée que les époux d’avant-hier auraient pu comparaître ensemble devant le Seigneur. Rendons-lui justice : il prescrivit, de sa main, des obsèques grandioses, auxquelles assistèrent deux cardinaux, des évêques, la noblesse du pays, des centaines de pauvres, et une foule innombrable.
Cinquante-sept ans après sa mort, des soldats protestants (refusant le culte des saints) ayant enlevé son corps pour le brûler, il fut trouvé sans corruption ; et l’on rapporte qu’il poussa des gémissements, et que, percé de leurs épées, il répandit du sang avec abondance.
PRIERE
” Nous honorons, Ô sainte Princesse, les vertus héroïques dont votre vie a été remplie, et nous glorifions le Seigneur qui vous a admise dans sa gloire. Mais que vos exemples nous sont utiles et encourageants, au milieu des épreuves de cette vie ! Qui plus que vous, a connu les disgrâces du monde ; mais aussi qui les a vues venir avec plus de douceur, et les a supportées avec plus de tranquillité ? Les grâces extérieures vous avaient été refusées, et votre cœur ne les regretta jamais ; car vous saviez que l’Epoux des âmes ne recherche pas dans ses élues les agréments du corps, qui trop souvent seraient un danger pour elles.
Le sceptre que vos saintes mains portèrent un instant leur échappa bientôt, et nul regret ne s’éleva en vous, et votre âme véritablement chrétienne ne vit dans cette disposition de la Providence qu’un motif de reconnaissance pour la délivrance qui lui était accordée La royauté de la terre n’était pas assez pour vous ; le Seigneur vous destinait à celle du ciel. Priez pour nous, servante du Christ dans ses pauvres, et faites-nous l’aumône de votre intercession.
Ouvrez nos yeux sur les périls du monde, afin que nous traversions ses prospérités sans ivresse, et ses revers sans murmure. Souvenez-vous de la France qui vous a produite, et qui a droit à votre patronage. Un jour, la tombe qui recelait votre sainte dépouille fut violée par les impies, et des soupirs s’échappèrent de votre poitrine, au sentiment des malheurs de la patrie. C’était alors le prélude des maux qui depuis se sont appesantis sur la nation française ; mais du moins la cause de la foi trouva, dans ces temps, de généreux défenseurs, et l’hérésie fut contrainte de reculer. Maintenant, le mal est à son comble ; toutes les erreurs dont le germe était renferme dans la prétendue Réforme se sont développées, et menacent d’étouffer ce qui reste de bon grain. Aidez-nous, conservez la précieuse semence de vérité et de vertus qui semble prête à périr. Recommandez-nous à Marie, l’objet de votre tendre dévotion sur la terre, et obtenez-nous des jours meilleurs.”
Lettre à son père, le roi Louis XI,
avant de partir pour la vie religieuse à Bourges
Mon Père, vous savez le désir que j’ai toujours eu dès mon jeune âge de plaire à la bénie Vierge Marie. Et un jour entre les autres que j’étais en grand désir de savoir comment je pourrais lui plaire parfaitement, la priant de tout mon cœur, en entendant la messe, qu’il lui plût de me l’enseigner et de me donner à connaître de quelle vie je devais vivre et aussi les religieuses de la Religion pour, en toutes choses, accomplir et faire son bon plaisir et celui de son Fils Jésus. Alors, je me sentis toute hors de moi-même, comme demi-ravie et m’étais avis que j’étais avec la digne Mère de mon Dieu et que je lui demandais de tout mon cœur l’accomplissement de mon désir.
Et elle me répondait : « Fais écrire tout ce qui est écrit en l’Evangile que j’ai fait en ce monde et fais-en une Règle et trouve moyen de la faire approuver du Siège apostolique. Et sache que pour toi et pour tous ceux et celles qui voudront la garder, c’est être en la grâce de Jésus mon Fils et en la mienne et que c’est la voie sûre d’accomplir les plaisirs de mon Fils et les miens. »