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30 janvier, sainte Bathilde, reine de France, vers 630- 30 janvier 680, fondatrice de l’Abbaye de Chelles et de Corbie.

Sainte Bathilde, reine de France, vers 630- 30 janvier 680,

fondatrice de l’Abbaye de Chelles et de Corbie.

La sainte reine Bathilde, de son vrai nom Balthilde, née auglo-saxonne, dans la première moitié du VIIe siècle, était, dit-on, de sang royal. Le plus complet silence règne sur son origine et sur son enfance.

Tout ce que l’on sait :

Surprise par des pirates, elle rut emmenée en Gaule et vendue à vil prix comme esclave. La Providence voulut qu’elle fût achetée par le maire du palais de Neustrie, allié par sa mère aux rois mérovingiens, Erchinoald (641). Celui-ci touché par sa grâce et sa beauté, la traita avec beaucoup de bonté et en fit son échanson, fonction qui la mettait à l’égal avec les grands officiers de sa maison.

Bathilde, d’un caractère doux, était sage, modeste, prudente et discrète dans ses paroles. Réglée dans toutes ses actions et de mœurs irrépro­chables, elle sut gagner les bonnes grâces de son maître, qui d’abord l’avait employée aux plus vils offices de sa maison. La jeune esclave, dans son humilité, ne dédaignait pas de rendre à ses compagnes les services les plus vulgaires. Erchinoald, devenu veuf et frappé des qualités qu’il remarqua dans cette jeune personne, conçut le dessein de l’épouser. Il s’en ouvrit à Bathilde, qui déclina un pareil honneur ; chrétienne, elle n’aspirait qu’à avoir Jésus pour époux. Aussi effrayée de ce projet, elle se cacha jusqu’à ce que son maître se fut résigné à prendre une autre épouse.

Erchinoald qui gardait pour Bathilde une grande et pieuse affection l’emmena à la cour de Clovis II 1, roi de Neustrie et de Bourgogne.

La Providence la destinait à occuper un rang plus élevé parmi les grands de ce monde.

Le roi Clovis II, fils et succes­seur du roi Dagobert, tomba éperdument amoureux de Bathilde, finit par l’épouser2 en 649 et en eut trois fils : Clothaire3, Childéric4 et Thierry5. [nous ne savons pas comment la jeune esclave abandonna son rêve de virginité perpétuelle.]

Ce Clovis Il était un personnage peu recommandable que les excès de gourmandise et de luxure rendirent fou avant de le conduire au tombeau, Clovis Il mourait à vingt-trois ans après dix-sept ans de règne (657).

Erchinoald disparaît et l’on voit s’élever le maire du palais Ébroin que les chroniqueurs ont attaqué à l’envi ; on a même cherché à rejeter sur Bathilde quelques-uns des méfaits de ce personnage.

Pendant la minorité de son fils Clothaire, Bathilde assura le gouvernement du royaume6, avec des conseillers expérimentés, au premier rang desquels Chrodobert, évêque de Paris, saint Eloi évêque de Noyon et saint Ouen7 évêque de Rouen.

Reine, elle ne fut point au-dessous de sa nouvelle fortune et son influence remplit bientôt tout le palais. Elle avait reçu de Dieu la grâce de la prudence ; elle obéissait au roi, son mari, comme à son maître, elle était pour les grands comme une mère, pour les évêques comme une fille, pour les adolescents comme une nour­rice attentive. N’oubliant pas qu’elle avait mené une vie errante, elle avait une tendre compassion pour les veuves, les pauvres et les orphelins. Aux bonnes œuvres elle joignait la prière, entretenant sous l’habit du siècle l’ardent désir de servir le Seigneur.

Elle combattit efficacement les simoniaques et interdit de recevoir quoi que ce fût pour la collation des ordres sacrés ; elle interdit de vendre des esclaves chrétiens ; elle supprima la capitation, impôt à payer par le chef de famille en raison du nombre des membres qui la composaient, loi impitoyable qui poussait les parents à laisser mourir leurs enfants pour échapper aux charges du fisc.

Le clergé eut à la cour une grande influence.

Clovis II rendit hommage à la fidélité, à la vertu, à la pru­dence de son épouse ; il lui donna un abbé Genesius (Genès) comme ministre de ses largesses. Il résidait au palais comme intendant pour servir les évêques, les pauvres, et s’occupait de l’envoi des nombreux présents que Bathilde offrait sans cesse aux églises et aux monastères ; ce saint homme devint plus tard évêque de Lyon.

La reine Bathilde présida de façon décisive à l’éclosion du monachisme dans son royaume, grâce à la pépinière de moines de l’Abbaye de Luxeuil fondé par saint Colomban, elle eut également un soin particulier de multiplier dans le royaume les églises.

Comme objet de ses bienfaits on cite en premier lieu le monastère de Chelles, dans le territoire de Paris, modeste asile de jeunes filles fondé par sainte Clotilde, Bathilde l’agran­dit. Elle fit des donations considérables aux monastères de Jumièges et de Fontenelle (Saint Wandrille et saint Philibert, fondateurs respectifs des abbayes de Fontenelle et de Jumièges en Normandie, méditèrent la règle de saint Colomban à l’abbaye de Luxeuil) ; Corbie au diocèse d’Amiens, reçut à son tour les bienfaits de Bathilde, qui fit reconstruire l’abbaye et plaça à sa tète le vénérable Théodefroid ; Jouarre, Faremoutier, Logium et Saint Evroul en Normandie, Saint-Laumer-le-Moutier ; elle fut la bienveillante protectrice et généreuse donatrice auprès des monastères colombaniens comme Saint-Pierre Saint-Paul de Luxeuil dans les Vosges fondé en 590, mais biens d’autres abbayes furent comblées de dons et de privilèges. Elle accorda des immunités et des exemptions aux basiliques de Saint-Germain et de Saint-Denis, à celles de Saint-Aignan d’Orléans et de Saint-Martin à Tours.

[Tout au cours des VIIe et VIIIe siècles, le monastère de Luxeuil a joué un rôle majeur au regard du recrutement des cadres de l’église du nord du royaume franc. Par ses relations privilégiées auprès des cours mérovingiennes et grâce à l’intervention de la reine Bathilde, il intervint pour la nomination des évêques et il participe activement aux fondations monastiques dans cette région septentrionale de la Gaule. Le succès du mouvement colombanien dans la société mérovingienne est le résultat de la conjonction du nombre de convertis et des moines irlandais qui, grâce à leur rang au sein de cette société aux mœurs barbares, ont su apporter une structure sociale et cultuelle en rapport avec les croyances païennes de la population locale au sein de communautés monastiques. La plupart de ces monastères fondés par le monachisme colombanien ont posé les bases nécessaires au développement des monastères bénédictins. L’on compte aujourd’hui 88 canonisations de pères abbés, de moines qui ont vécu ou fait leur formation, dans ce monastère]

L’influence de Bathilde parut dans l’exercice des bonnes œuvres en 652 ; pendant que la famine sévissait dans le royaume, elle donna le jour à un enfant. qui reçu le nom de Clotaire ; les années suivantes naissaient Chil­déric en 653, Thierry en 654.

Comme la réputation de science et de vertu de Léger, archidiacre de Poitiers, étant parvenue jusqu’à elle, la reine Bathilde le fit venir au palais qu’il ne quitta que pour devenir évêque d’Autun (663). La politique de la reine Bathilde avait un caractère nettement ecclésiastique et les évêques prenaient une part considérable dans les mesures qu’elle édictait.

C’est à I’influence bienfaisante de la reine régente qu’il faut attribuer l’harmonie et la paix entre l’Austrasie et les royaumes unis de Neustrie et de Bourgogne, la répression des désordres de la simonie dans le clergé.

A l’époque de Bathilde, la réunion du Regnum Francorum (la Neustrie, l’Austrasie et la Bourgogne) était devenue une œuvre fort difficile. Après la mort de Sigebert Il d’Austrasie, frère de Clovis n (658), le maire du palais, Grimoald, fit tondre et exiler en Irlande le fils de Sigebert Il et lui substitua son propre fils. Après la mort de Grimoald (663) Bathilde prit l’Austrasie et imposa comme roi son second fils, Childéric II.

Les aspirations de Bathilde ne furent vraiment satisfaites que le jour où, descendant du trône, elle put se réfugier dans le cloître.

Au maire du palais Erchinoald avait succédé Ebroïn, une brute sanguinaire qui s’en prit à l’orgueilleux prélat de Paris, Sigobrand, qu’il fit assassiner par les grands du royaume, malgré les efforts de la reine pour le sauver. Délivré de ce rival, Ebroïn voulut aussi se débarrasser de la tutelle de la régente qu’il estimait tout en la trouvant encombrante et Bathilde, obligée de se dessaisir du pouvoir, fut conduite au monastère de Chelles (Seine-et-Marne). Ceci dut se passer avant 673.

Bathilde passa dans ce monastère, qu’elle avait royalement agrandi et auquel elle avait donné comme abbesse Bertila, qu’on était allé chercher à l’abbaye de Jouarre, les dernières années de sa vie, soumise en toute simplicité aux autres moniales et se tenant toujours effacée et humble.

Admise dans le célèbre cloître, elle témoigna à toutes les sœurs une tendre affection, se soumit il l’abbesse comme la plus humble des religieuses, suivit avec une fidélité exemplaire les exercices de la communauté. Cédant à son attrait particulier pour les œuvres de miséricorde, elle allait fréquemment au chevet des malades et des infirmes. Elle aurait passé paisiblement ces années de vie monastique dans l’oubli des grandeurs si le sort des royaumes gouvernés par elle n’était venu lui causer de douloureuses inquiétudes. La mort préma­turée de son fils Clotaire III, en 673, vint rompre I’union qui jusque-là, avait régné entre ses enfants. Cette perspective de sanglantes discordes fut une cause d’épreuves auxquelles vint se joindre une grave maladie.

Comme le moment de sa mort approchait, Bathilde eut une vision consolante. Devant l’autel de la vierge Marie, il lui sembla voir une échelle dont le sommet atteignait le ciel. Elle-même en gravissait les degrés, accompagnée par les anges du Seigneur. C’était l’indication que ses mérites, sa patience, son humilité allaient recevoir leur récompense. Aux quelques religieuses témoins de cette vision, elle défendit d’en parler avant sa mort.

Cet heureux moment arriva pour elle le 30 janvier 680, au plus tard.

Epilogue

Selon les usages du temps, le corps de Bathilde, revêtu des habits religieux, le visage découvert, fut porté dans l’église abbatiale au chant des psaumes et des cantiques sacrés. On l’enferma dans un sarcophage de pierre, sous le pavé de l’église. Dieu, par des miracles à ce tombeau, fit éclater les mérites de Bathilde ; des malades et des démoniaques y retrouvèrent la santé et la paix.

En 833, devant l’empereur Louis le Débonnaire, il y eut une exhumation et le corps fut retrouvé intact; de nou­veaux miracles se produisirent.

Le pape Nicolas Il béatifia Bathilde au XIe siècle ; la fête principale a été fixée au 30 janvier, qui, selon l’opinion la plus vraisemblable, est l’anniversaire de la mort. Cependant, jus­qu’en 1922, le martyrologe romain mentionnait Bathilde au 26 janvier.

Le corps de la sainte reine Bathilde fut, sous la révolution française, protégé par les habitants de Chelles qui le portèrent dans l’église Saint-André où il est encore. Quelques reliques qui ont été extraites de l’ensemble, sont à Rome, dans la chapelle de Pie IX, à la cathédrale de Meaux, à l’abbaye de Jouarre, à Bray­-sur-Somme et à Mailly ; les reliques de Corbie ont été détruites par les révolutionnaires.

*****

Notes

1- Clovis Il, second fils du roi Dagobert 1e et de Nanthilde, né en 635, fut réclamé comme roi par les Neustrien, tandis que son frère aîné, Sigebert, avait reçu l’Austrasie, avec diverses dépendm1ces en Aquitaine et en Provence. Après la mort de Dagobert (19 janvier 639), Clovis fut, sans difficulté, reconnu comme roi par les grands de Neustrie et de Bourgogne et son royaume fut gouverné par sa mère, assistée du main: du palais de Neustrie (Aega, mort en 642, fut remplacé par Erchinoald, pour la Neustrie, et par Flaochat, pour la Bourgogne). Sa mère étant morte en septembre 642, Clovis Il, tant en Neustrie qu’en Bourgogne, laissa le gouvernement aux maires du palais : lui et son frère Sigebert sont considérés comme les premiers rois fainéants. Il mourut fou à l’âge de vingt-trois ans (657).

2- « Je suis votre esclave et, de gré ou de force, il faudra que je me soumette à votre volonté; dit Bathilde au Roi qui lui répondit. (Ille esclave ne saurait s’asseoir sur un trône des francs, je VOliS déclare libre, et libre aussi de refuser ma main. »

3- Clothaire III (né en 652, mort en 671) devint roi de Neustrie et de Bourgogne à la mort de son père ; son royaume fut gouverné par sa mère puis par le maire du palais, Ébroïn.

4- Childéric II (né après 652, mort en 675) fut proclamé roi d’Austrasie (662) après que les grands eurent renversé le maire du palais, Grimaud, et son fils, Childebert, qu’il avait fait roi, sous Childéric, l’Austrasie fut gouvernée par le duc Gonfaud (maire du palais). Après la déposition de son frère, Thierry III (673), Childéric fut proclamé roi de Neustrie. Ayant réuni tous les royaumes francs, Childéric voulut les gouverner en maître absolu et fit si mal qu’il fut assassiné lors d’un chasse. Childéric Il fut le dernier mérovingien qui essaya de régner.

5- Thierry III fut proclamé roi de Neustrie à la mort de son frère, Clotaire III, mais il fût presque aussitôt déposé par son autre frère, Childéric Il, et enfermé à l’abbaye de Saint-Denis. Il retrouva sa couronne à la mort de son frère. Battu par, à Tertry (687) par Pépin d’Héristal (père de Charles Martel), maire du palais d’Austrasie, il ne régna plus qu’en titre et mourut en 691.

6 Nous possédons de sa main des souscriptions à des diplômes en faveur de Frodohert, abbé de Chelles (658-659) et en faveur de saint Mommelin, évêque de Noyon-Toumai, ct de saint Bertin, abbé de Sithiu (663).

7- Saint Ouen, entré dans l’administration sous Clothaire Il fut sous Dagobert 1°, référendaire, surveillant la rédaction des actes officiels et les scellant du sceau royal dont il avait la garde.

8- Les chroniqueurs anglais, notamment Eddius Stephanus, repro­chent nettement à Bathilde d’avoir fait assassiner Aunemundus ; évêque de Lyon, pour placer sur ce siège épiscopal son collaborateur l’abbé Genesius. Cet épisode cadre si peu avec le reste qu’un sérieux doute est permis quant à son historicité.

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