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Office de la Passion
Vendredi Saint 2018
Chers frères et sœurs,
La participation à l’Office du Vendredi Saint nous remet devant les yeux le drame qui s’est déroulé il y a presque 2000 ans sur un petit coin de terre, en Israël, mais qui nous concerne tous et nous rejoint tous. A la différence des protagonistes de ce drame, nous le revivons, éloignés dans le temps, et avec un regard de foi.
Je vous propose de poser ce soir deux regards sur la Passion de Jésus. Nous pouvons tout d’abord la regarder comme le lieu d’un combat. Dans ces quelques pages que nous venons d’entendre, nous ne pouvons pas nous habituer à la violence qui se déchaîne. On trouve presque toutes les formes de violence : morale, physique, psychologique même. Jésus est enchaîné, giflé, flagellé, battu, crucifié. Sur le plan psychologique, alors qu’Il demande à être entouré, accompagné, Il est trahi par deux fois : d’abord par Judas, puis par Pierre ; Il est abandonné, moqué, provoqué, insulté. Et, alors qu’Il est en train de mourir et qu’Il a soif, on lui donne du vinaigre ! Et face à cette violence, Jésus ne répond pas. Il ne se révolte pas. Il laisse faire. Il répond le minimum, mais quand Il voit que cela ne sert plus à rien, il arrête.
La Passion est encore le lieu d’un combat qui voit s’opposer l’injustice à l’acte d’offrande et d’assomption. A nouveau, nous pouvons remarquer que dans la Passion, rien n’est juste. Il n’y a rien de juste. Le mensonge, les faux-témoignages, la jalousie semblent triompher. A nouveau, Jésus ne répond rien. Il ne répond rien en tout cas verbalement. Il offre à son Père ce déferlement de haine, d’injustice. Même la justice devant laquelle il est traduit est injuste ! Son procès est illégitime. En fait, Il n’aurait pas dû être condamné à mort, parce que la sentence est illégitime. Son procès est injuste pour trois raisons : tout d’abord, dans la Loi juive, on ne peut rendre justice dans la nuit. Il faut qu’il fasse jour. Deuxièmement, le Grand Prêtre va rendre sa sentence chez lui, alors que, pour que sa sentence soit valable, elle doit être rendue au Tribunal. Et puis, Jésus n’a pas de témoins…alors que dans la Loi juive, tout accusé doit avoir un témoin et tout accusé a le droit à une défense ! Rien n’est juste. Face à cette injustice, la réponse de Jésus est dans l’offrande à son Père. Il assume tout et Il offre tout : l’injustice, le fait que l’on rejette Dieu, qu’on insulte Dieu, le fait qu’on se sente abandonné de Dieu, le fait qu’on tue Dieu. Cette assomption parfaite n’est pas une vertu héroïque, ou le fait d’un super-homme. Elle ne peut s’expliquer que par un Amour infini et parfait pour nous. En fait, la Passion nous montre le combat entre le mal et l’Amour. Mais c’est l’Amour qui a le dernier mot ; c’est l’Amour qui supporte, assume et offre. L’auteur de la lettre aux Hébreux nous propose une belle synthèse en écrivant : « Le Christ (…) a présenté (…) sa prière et sa supplication à Dieu qui pouvait le sauver de la mort ; et parce qu’il s’est soumis en tout, il a été exaucé. (…) Il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel. »
Cet Amour infini de Dieu nous amène à poser un deuxième regard sur la Passion de Jésus. Nous pouvons y voir la Passion comme le lieu d’où jaillit une source de vie. Pour percevoir cet aspect, il faut s’appuyer sur les autres récits de la Passion. Mais trois évènements nous montrent la puissance de Vie déjà à l’œuvre dans la Passion. Il y a tout d’abord, l’oreille de Malcus, le serviteur du Grand-Prêtre ; cette oreille que Pierre va couper et que Jésus va guérir immédiatement. Il y a un de ces deux larrons crucifié à côté de Jésus qui demande pardon et à qui Jésus promet aujourd’hui même le Paradis. Et il y a le centurion qui va percer le côté de Jésus et qui se convertit immédiatement : « Vraiment, cet homme était le Fils de Dieu ! » Nous pouvons passer à côté de ces petits détails ; mais, un lecture attentive, une lecture avec le cœur, nous montre la puissance de vie de Dieu déjà à l’œuvre au cœur du mal.
Ces deux regards que je vous propose de poser ce soir, nous redisent que la clé du salut, de la vie éternelle, réside dans notre Communion au sacrifice de Jésus. Nous vivons des situations injustes ? nous subissons la violence, la méchanceté de ceux qui sont jaloux ? nous sommes objet de haine pour d’autres ? nous souffrons ? physiquement ? moralement ? psychologiquement ? nous ne sommes pas heureux ? Le chemin de vie est dans notre communion avec Jésus. Reconnaissons nos souffrances dans les siennes ; offrons-nous avec Lui. Alors, nous communierons à cette puissance divine d’Amour, de Vie, qui jaillit de la Passion. Il y a une bonne nouvelle dans toutes nos passions : elle découle de notre communion avec Jésus. C’est un chemin de vie au cœur de la mort. Amen !