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Jeudi Saint 2018
Chers frères et sœurs,
Ce soir, en entrant dans le Triduum pascal, nous commémorons l’institution de deux sacrements : celui de l’Eucharistie et celui du Sacerdoce. Ces deux sacrements ont été institués en même temps ; ils ont par conséquent un lien profond qui les unit parce qu’ils ont la même origine : Jésus lui-même. On ne peut pas comprendre le Sacerdoce ministériel en dehors du lien à l’Eucharistie, parce que le Sacerdoce est institué pour être au service de l’Eucharistie. Dit autrement, on ne peut pas comprendre le ministère des prêtres en dehors de la célébration de la messe. Et ce point est fondamental. On peut attendre beaucoup de choses des prêtres ; mais il y en a une que l’on est en droit d’attendre : c’est la célébration de la messe. Après, le prêtre évangélise, transmet la foi, célèbre les sacrements, accompagne les gens. Mais, la première chose fondamentale que fait le prêtre et qui définit son être, son identité, c’est qu’il célèbre la messe.
Si l’on comprend cela correctement, alors on comprend le célibat des prêtres. Le célibat des prêtres ne s’explique pas d’abord par une question de plus grande disponibilité. Le célibat des prêtres s’explique d’abord par une question de don. Le célibat consacré est un don au service de l’Eucharistie. On ne peut pas comprendre de manière juste le célibat sacerdotal en dehors de la question du don que le prêtre fait de lui-même quand il célèbre la messe, tout comme Jésus s’est donné lui-même en célébrant la première messe. Le Sacerdoce ne consiste pas en une question de fonction, mais de don. Les prêtres ne sont pas des fonctionnaires du culte, ce à quoi on les réduit trop souvent. Leur identité profonde c’est le Christ Jésus lui-même qui se donne. Alors, il est vrai que l’on peut être inquiet lorsque des prêtres ne célèbrent pas régulièrement la messe, non pas parce qu’ils ne le peuvent pas, mais parce qu’ils font passer d’autres priorités avant. Dans la même logique, il faut prier pour que soit toujours mieux compris et approfondi le lien entre le sacerdoce ministériel et le don à un peuple, en l’occurrence à une paroisse. La fécondité du Sacerdoce vient du fait que le prêtre est un don de Dieu pour son Eglise et non un fonctionnaire du culte.
Frères et sœurs, il est donc impossible et il n’est pas juste de penser l’Eglise sans ou indépendamment du Sacerdoce ministériel. Comme nous le disons dans le Credo, l’Eglise est apostolique, c’est-à-dire qu’elle repose sur les Apôtres, sur ceux à qui Jésus a confié la charge de célébrer l’Eucharistie. Il est heureux que nous sortions aujourd’hui des oppositions idéologiques de ces dernières années. Si le Sacerdoce est la colonne sur laquelle repose l’Eglise, le Sacerdoce est au service de l’Eucharistie et du peuple de Dieu. Il n’est et ne doit jamais être une fin en soi. Opposer prêtres et laïcs comme on l’a trop souvent vu ces dernières années est stupide et stérile. Les prêtres sont là pour les fidèles et les fidèles ont besoin des prêtres. Tout le reste n’est qu’opposition idéologique et querelle de pouvoir.
Puisque le Sacerdoce est institué pour être au service de l’Eucharistie, je voudrais terminer ma méditation avec vous en regardant l’Eucharistie, l’Eucharistie comme un don d’amour et comme le lieu de la réconciliation et du pardon.
L’Eucharistie est tout d’abord un don d’amour : c’est l’Amour infini de Dieu qui pousse Jésus à s’offrir sous les espèces sacramentelles du pain et du vin pour que le monde puisse bénéficier, puisse communier, à son sacrifice rédempteur. Et l’Eucharistie est aussi un don en vue de l’Amour. Ceux qui reçoivent ce sacrement, reçoivent l’Amour infini de Dieu qui va les pousser à aimer les autres et à se donner aux autres. On comprend alors l’importance de l’Eucharistie qui nourrit les dons du Sacerdoce et des couples mariés dans les sacrements de l’Ordre et du mariage.
Mais l’Eucharistie est aussi le lieu, l’aliment de la réconciliation, d’une communion nouvelle et de l’unité. Il ne vous échappera pas que Jésus institue l’Eucharistie au moment même où Judas le trahit. Alors qu’Il est trahi, qu’Il va être abandonné par les siens, Jésus institue ce sacrement comme le sacrement d’une unité nouvelle, comme le sacrement qui lave des trahisons, qui donne le pardon, et qui permet une communion nouvelle. On retrouve cette dimension de pardon de l’Eucharistie dans le rite que la liturgie nous propose pour ce jour : le lavement des pieds. « Si tu n’acceptes pas que je te lave les pieds, tu n’auras pas de part avec moi » dit Jésus à Pierre ; c’est-à-dire, tu n’auras pas part au pardon que je te donne. L’Eucharistie fait entrer dans une Nouvelle Alliance avec Dieu ; elle est source d’une communion nouvelle au-delà de nos péchés, de nos divisions. Elle est même, pourrait-on dire, l’antidote, le médicament qui guérit des divisions. L’Eucharistie est au service du commandement de l’Amour mutuel et fraternel. Elle est le sacrement qui nous permet de nous aimer, de nous réconcilier, de nous pardonner.
Ce soir, rendons grâce à Dieu pour les dons de l’Eucharistie et du Sacerdoce à l’Eglise et au monde. Prions pour que les chrétiens sachent donner le goût à des jeunes de devenir prêtre. Vous êtes les mieux placés pour voir et savoir que nous avons besoin de prêtres. L’Eglise ne peut pas seulement se préoccuper de gérer la pénurie de vocations sacerdotales en réorganisant les paroisses en conséquence, en créant de nouvelle structures; elle doit aussi et en tout premier lieu prier, susciter, accompagner et soutenir les jeunes qui s’interrogent sur la vocation sacerdotale qui ne sont pas soutenus par le monde actuel, bien au contraire, et même parfois par leur famille. C’est une intention que je vous invite à porter cette nuit dans votre prière devant l’Adoration du St Sacrement. Amen !