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Solennité de Noël
Messe de la Vigile
Frères et sœurs,
Avec cette longue généalogie que nous venons d’entendre, l’évangéliste St Matthieu nous montre que le Fils de Dieu se fait fils de l’homme. Le Fils de Dieu s’inscrit dans une généalogie humaine, Il entre dans notre temporalité, dans notre histoire humaine, dans l’histoire d’un peuple : le peuple Hébreu. Dieu entre dans le tréfonds de notre humanité.
Tous les noms que nous venons d’entendre ne vous disent certainement pas grand-chose, mis à part quelques-uns comme Abraham, Isaac, Jacob, David, Salomon, Joseph et Marie. Ceci-dit, outre le fait de rattacher la naissance de Jésus à l’origine du peuple Hébreu avec la figure d’Abraham et de faire descendre Jésus de la tribu royale d’Israël avec la figure du Roi David, il y a 4 discrètes petites particularité dans cette généalogie. On y trouve mentionnées 4 femmes dans une généalogie exclusivement masculine : Thamar, Rahab, Ruth et Betshabée. Ces 4 femmes n’arrivent pas par hasard dans la généalogie humaine de Jésus, Fils de Dieu. Qui sont-elles ?
Thamar était la femme d’Er qui mourut. Elle épousa donc le frère d’Er, Onan, pour pouvoir donner une descendance à la famille. Mais ce dernier refusa de donner une descendance à la femme de feu son frère. Thamar se déguisa donc en prostituée et coucha avec son beau-père pour pouvoir transmettre la vie. Thamar est donc considérée comme une prostituée qui commet en plus un inceste.
Rahab, qui habitait Jéricho, est une prostituée qui va se repentir de sa vie et croire au Dieu d’Israël. Lorsque les Hébreux en 1446 avant Jésus-Christ sont aux portes de la Terre Promise, elle accueillera et cachera les espions Hébreux venus observer la Terre Promise avant l’entrée du peuple.
Ruth est issue de la tribu de Moab, donc descendante de l’inceste de Loth avec ses filles après s’être échappés de Sodome et de Gomorrhe. Ruth est une femme vertueuse, mais dont les origines sont étrangères au peuple Hébreu.
Et enfin, Bethsabée, qui coucha avec le Roi David après que ce dernier eût tué son mari, Urie. L’image de Bethsabée que l’histoire d’Israël sanctifie, est liée à l’immoralité, au meurtre et au mensonge.
« Quelle généalogie » me direz-vous ! Quelle particularité ont ces 4 femmes ? Elles assurent la descendance de la lignée quand il y a rupture. Elles permettent la réalisation du plan de Dieu malgré leur péché. Ces 4 femmes préparent et annoncent l’arrivée d’une 5ème qui, elle aussi, assurera la descendance de la lignée dans une rupture qui cette fois-ci viendra de Dieu et non des hommes : il s’agit de Marie. Marie est celle qui fait entrer Dieu dans cette généalogie. La rupture qu’elle introduit dans la généalogie permet à chacun de nous, quelle que soit notre généalogie humaine, de fonder notre origine en Dieu.
Avec ces 4 femmes, nous arrivons donc à une autre signification de cette généalogie, outre le fait d’inscrire le Fils de Dieu dans l’histoire humaine ; cette généalogie nous montre que Dieu, en nous rejoignant, vient sanctifier une humanité pécheresse. Voilà ce qu’est l’Incarnation. Dieu nous rejoint au plus profond de notre humanité dans ce qu’elle a de moche, pour nous sauver et nous sanctifier.
La Fête de la Nativité du Fils de Dieu est la plus haute manifestation de l’Incarnation. On a souvent tendance à regarder l’Incarnation comme une réalité évidente, simple. Mais il n’en n’est rien ! L’Incarnation, c’est lourd. Celui qui par nature est invisible devient visible ; celui qui est insaisissable devient saisissable ; celui qui demeure avant le temps entre dans le cours du temps ; celui qui est impassible devient passible ; celui qui est immortel devient mortel ; celui qui est la Parole se fait petit enfant, c’est-à-dire celui qui ne sait pas parler et qui va devoir apprendre à parler ! Voilà, ce que c’est que l’Incarnation. L’Incarnation du Fils de Dieu, c’est entrer dans une nature limitée, imparfaite, pécheresse. Et tout cela pour quoi ? pour nous sauver. Comme nous le disons dans le Credo : « Pour nous les hommes et pour notre salut, Il descendit du Ciel. Par l’Esprit-Saint, Il a pris chair de la Vierge Marie et s’est fait homme. »
Ce soir, nous qui, au cours de cette messe attendons la naissance du Fils de Dieu, entrons dans ce mystère du salut que Dieu vient nous offrir. Pour vivre un vrai Noël, un Noël chrétien, dépassons la fête profane de Noël qui se réduit pour beaucoup à un bon repas et à des cadeaux. Noël, c’est bien autre chose : c’est l’Avènement de notre salut. Comme le dit l’Ange à St Joseph, c’est accueillir Jésus, Celui qui vient nous sauver de notre péché. C’est notre nouvelle naissance comme nous le redira la messe de demain, la messe du Jour de Noël. Ce soir, rendons grâce à Dieu pour le cadeau de Noël qu’Il nous fait à tous : le don du Salut qu’Il vient nous offrir en son Fils Jésus qui vient naître et habiter en chacun de nous. Amen !