+
Pentecôte 2013
Frères et sœurs,
On peut s’interroger en cette fête de la Pentecôte sur ce que l’Eprit-Saint nous apporte, sur ce qu’Il nous donne, alors que nous nous souvenons que nous avons été baptisés et même pour la plupart d’entre nous confirmés.
Le premier élément que je voudrais immédiatement vous redire, c’est que l’Esprit-Saint, l’Esprit de Dieu, permet à Dieu d’habiter en nous. Cet Esprit nous a été donné au jour de notre baptême, et Il vient consolider et renforcer cette habitation de Dieu en nous par le sacrement de la confirmation . Trop souvent, nous cherchons Dieu en dehors de nous, nous le considérons comme une réalité extérieure à nous ; certes, Dieu est distinct de nous, mais Il se donne à nous, et Il se fait intérieur à nous. Beaucoup de personnes, même en priant Dieu, se confient à l’Esprit-Saint : ceci est très juste car il est le garant de notre prière ; mais n’oublions pas qu’Il est déjà en nous et que c’est Lui qui nous dispose à l’ouverture de cœur à Dieu dans la prière. Cet Esprit Saint qui habite en nous nous permet en outre de nous enraciner dans l’Amour de Dieu : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera ; nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui. » nous dit Jésus. La fidélité à Dieu s’enracine dans l’Amour et c’est l’Esprit-Saint qui nous permet d’aimer Dieu ; c’est l’Esprit-Saint qui nous apprend à aimer Dieu et à lui être fidèle. Alors, même si grâce à la liturgie, va nous être donnée à chacun d’entre nous, la grâce de recevoir à nouveau les effets du don de l’Esprit-Saint en ce jour de la Pentecôte, la véritable question est donc celle –ci : est-ce que nous écoutons l’Esprit-Saint qui est en nous ? Et pour nous aider à répondre à cette question, il faut regarder la manière dont l’Esprit-Saint agit au plus profond de nous-même.
A ce sujet, l’Evangile de la Vigile de la Pentecôte est plus clair que celui que nous venons d’entendre. Je vous relis ce que nous disait l’Evangile d’hier soir : « En effet l’Esprit-Saint n’avait pas encore été donné, parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié par le Père. » L’Evangile du Jour nous dit la même chose, mais de manière moins claire : « Mais le Défenseur, l’Esprit-Saint que le Père enverra en mon Nom, Lui vous enseignera tout, et Il vous fera vous souvenir de tout ce que je vous ai dit. » Ces deux textes nous disent que l’Esprit-Saint est celui qui accomplit le mystère pascal de Jésus. Dans le premier cas, l’Esprit-Saint ne sera donné qu’une fois la Passion de Jésus et sa Résurrection passées. Dans le deuxième cas, l’Esprit-Saint viendra au secours des disciples dans leur mission. C’est l’Esprit-Saint qui va parfaire dans le temps notre filiation divine. C’est l’Esprit-Saint qui va déployer dans le temps la grâce de Jésus, l’œuvre du Christ. Cette action de l’Esprit de Dieu ne diminue ni n’altère en rien notre liberté humaine : elle ne se substitue pas à notre liberté. Au contraire, elle la respecte, mais elle vient au secours de notre humanité, elle vient suppléer notre faiblesse, comme l’indique la Séquence du Veni Sancte Spiritus : « Sans ta puissance divine, il n’est rien en aucun homme, rien qui ne soit perverti. / Lave ce qui est souillé, baigne ce qui est aride, guéris ce qui est blessé etc… » La première lecture nous illustre cette action de l’Esprit-Saint : l’Esprit-Saint va transformer la situation bloquée que vivaient les apôtres. Reclus dans leur maison par peur des Juifs, en accueillant l’Esprit de Dieu, ils sortent de leur maisons et deviennent des évangélisateurs audacieux. L’Esprit Saint n’a en rien altéré leur humanité, mais Il l’ transformé selon le dessein et la volonté de Dieu. Et aujourd’hui encore, l’Esprit de Dieu continue de purifier notre humanité pour la rendre capable de et apte à Dieu. Dit encore autrement, l’Esprit-Saint est celui qui tout doucement, comme son nom l’indique, nous sanctifie, nous transforme selon Dieu.
Voilà ce que nous pouvons dire, d’un point de vue personnel, sur l’action de l’Esprit-Saint en nous. Car l’Esprit-Saint a encore un terrain d’action privilégié, et ce terrain c’est celui de l’Eglise. Je disais tout à l’heure qu’une de ses missions, c’est précisément de déployer dans le temps l’œuvre du Christ. Effectivement, Il le fait en soutenant, en vivifiant l’Eglise. On peut dire que l’Eglise est fondée par Jésus, qu’elle est instituée par Jésus, qu’elle naît de son côté ouvert sur la Croix d’où jaillissent de l’eau et du sang , signes des sacrements du baptême et de l’Eucharistie. Mais l’Eglise entre pleinement en mission avec la Pentecôte, avec le don de l’Esprit-Saint. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous mentionnons l’Eglise, dans le Credo, après l’Esprit-Saint et non après la personne de Jésus.
Alors, comment l’Esprit-Saint agit-il en nous pour construire et vivifier l’Eglise du Christ ? Eh bien de plusieurs manières. Tout d’abord par ses multiples dons, charismes et fruits, et ensuite, en constituant et en réalisant son unité.
Quelle différence y a –t-il entre les dons, les charismes et les fruits de l’Esprit-Saint ?
Les dons de l’Esprit-Saint sont des dispositions permanentes qui rendent l’homme docile à suivre les inspirations divines : ils sont au nombre de 7 : la crainte de Dieu, la piété, la sagesse, l’intelligence, le conseil, la force et la science. Ces dons s’appuient sur les vertus théologales que sont la foi, l’espérance et la charité. On les reçoit lors de la confirmation.
Les charismes sont des dons particuliers de l’Esprit-Saint impartis aux personnes pour le bien des hommes, pour les nécessités du monde et pour l’édification de l’Eglise. Les charismes sont l’expression de la grande générosité de Dieu qui répand ses dons avec abondance. Mais ces derniers nécessitent un discernement par l’Eglise. Tout le monde n’a pas, à proprement parler, de charisme. Les charismes ne sont pas des grâces permanentes, mais ils sont comme des souffles qui viennent de Dieu. Quoi qu’il en soit, ce qui authentifie les charismes, c’est la manière dont nous les utilisons et la manière dont ils servent au Bien de l’Eglise.
Enfin, les fruits de l’Esprit-Saint sont des perfections formées en nous comme des prémices de la gloire éternelle. Ils sont une conséquence directe de l’habitation de l’Esprit de Dieu en nous et d’une vie selon l’Esprit de Dieu.
Ainsi, à travers ses dons, ses charismes, et ses fruits, l’Esprit-Saint vivifie l’Eglise et l’édifie. Les dons, les charismes, les fruits sont différents, et pourtant, c’est le même Esprit qui en est à l’origine et qui est à l’œuvre. C’est pourquoi, l’Esprit est aussi celui qui permet l’unité de l’Eglise. L’Eglise n’est pas une institution humaine ; elle est une institution divine. Mais, si nous la considérons du point de vue humain (ce qu’elle n’est pas par essence), eh bien, il n’y a aucune autre institution humaine qui ne regroupe en son sein autant de différence que l’Eglise : différence de langue, de culture, de races, de sensibilités, d’histoires. Et cette co-existence n’est possible que grâce à l’Esprit-Saint. C’est Lui qui fait et permet l’unité entre le Père et le Fils ; c’est Lui qui permet l’existence de légitimes différences –dans les familles spirituelles, dans les sensibilités liturgiques- et qui en même temps tient tout le monde dans l’unité. C’est Lui qui permet à l’Eglise d’avoir en son sein de nombreuses communautés : des communautés nouvelles, des communautés traditionnelles, des communautés charismatiques, des communautés religieuses contemplatives, apostoliques, etc…, Que chacun d’entre nous ait un goût plus prononcé pour telle ou telle famille, telle ou telle sensibilité, est tout à fait légitime…Mais prenons garde à ce que chacun d’entre nous accepte la légitime diversité des autres, au risque de tomber dans l’intégrisme moderne, qui consiste à rejeter, dénigrer et combattre la sensibilité des autres sous prétexte qu’elle ne correspond pas à mon idée de l’Eglise. L’Eglise se reçoit de Dieu ; elle ne se construit pas selon un schéma pré-établi qui aurait été décidé par quelques uns.
Que l’Esprit-Saint vienne nous vivifier à nouveau par ses propres dons pour notre bien personnel, pour le bien de l’Eglise et qu’Il vienne consolider notre unité, parfois fragile, car c’est ici en premier lieu que le Démon cherche à nous abîmer. Amen !