Marie-Claude, Cyprienne BRARD (1736-1794), Carmélite
Marie Claude Cyprienne Brard est l’un des quatre enfants de Maître Jean Jacques Brard (1694-1782) qui est à la fois Bailli de justice du marquisat de L’Aigle et Receveur des aides (Impôts indirects) à Bourth. Dans le village, il possède une ferme au hameau du Gérier. II a épousé Anne Marie Catherine Moulin, fille d’un avocat de Breteuil.
Les frères et sœurs de Marie sont un garçon qui sera avocat à Breteuil, une fille qui épousera un avocat de Breteuil et une autre fille qui sera religieuse dans la congrégation enseignante de la Providence.
Leur grand-père, François Brard (1665-1730), marchand, est mort à Bourth . II était fils de Louis Brard (1641-1676), marchand, mort à Bourth, associé à son beau-frère Cyprien Morel, maître de grosse forge à Bourth , et lui-même fils de Jacques Brard, né à Rouen, fabricant d’épingles à Rugles puis à Bourth.
Marie Brard appartient donc à une famille notable de Bourth.
Elle est baptisée le 12 mai 1736 dans l’église paroissiale de Bourth. Sa marraine est la femme de son oncle François Brard, qui rend la justice au nom du comte de Tillières, dans la baronnie de Bourth, avec le titre de Bailli haut justicier.
Elle passe sa jeunesse à Bourth, fréquentant l’école des filles tenue par une sœur de la Providence.
En juin 1755, elle appose sa signature — M.C.C. Brard — sur le registre des baptêmes, étant marraine d’un nouveau-né de la famille Yver.
A vingt ans, en juin 1756 , elle entre comme Postulante au Carmel de Compiègne. Étape suivante le 12 août 1757, elle devient Novice. Elle sera désormais « Sœur Sainte-Thérèse Euphrasie de l’Immaculée-Conception » et plus couramment appelée Sœur Euphrasie. Le 13 août 1758, elle prononce ses vœux.
Elle va mener une vie de religieuse pendant plus de trente ans . Des lettres reçues, au couvent et des souvenirs rédigés par une autre religieuse évoquent Sœur Euphrasie et la présentent comme une femme dotée d’une forte personnalité.
Elle avait de l’humour, de l’esprit, et sa conversation était appréciée de la Reine Marie Leszczynska , épouse de Louis XV, qui venait parfois en voisine du Palais Royal de Compiègne se reposer de l’étiquette officielle parmi les Carmélites. Elle appelait Sœur Euphrasie « sa toute aimable et religieuse philosophe ».
La Révolution abolit les vœux monastiques le 13 février 1790. Le 4 août suivant, on fait l’Inventaire du mobilier du couvent. Le lendemain, on fait savoir aux religieuses qu’elles peuvent retourner dans leurs familles. « Mme Brard déclare que, religieuse de son plein gré et de sa volonté, est dans la ferme résolution de conserver son habit, dût-elle acheter son bonheur au prix de son sang». Le14 septembre, les religieuses sont expulsées du couvent. Elles s’installent dans des maisons du voisinage, tout en s’efforçant de continuer à observer leur règle.
Le 4 juin 1794, chacune reçoit un certificat de résidence qui comporte son signalement. Celui de Madame Brard précise : « Taille quatre pieds dix pouces (1m58), cheveux gris, sourcils gris, yeux bleus, nez bien fait, bouche moyenne, menton rond, front élevé, visage rond ».
Le 22 juin 1794, Ie Comité Révolutionnaire de Compiègne ordonne l’incarcération des seize Carmélites. Le 25, il transmet au Comité de Salut Public à Paris un acte d’accusation nominatif avec 31 pièces à conviction. Le 12 juillet, sur un arrêté du Comité de sûreté générale, elles sont placées dans deux charrettes attelées, les mains attachées dans le dos, et expédiées à Paris où elles sont internées le 13 à la Conciergerie. En prison, leur courage et leur foi émeuvent les autres suspects.
Elles sont présentées le 17 devant le Tribunal Révolutionnaire, qui les condamne à mort. Ramenées à la Conciergerie, elles sont placées dans des charrettes et conduites à la « Barrière du Trône Renversé » – place de la Nation -. Chantant des cantiques pendant le trajet, elles font l’admiration du public.
Un peu avant d’arriver place du Trône renversé, sœur Euphrasie, se penche vers une jeune fille qui suit la charrette et lui tend son bréviaire. L’inconnue se nomme Virginie Binard. La paix religieuse restaurée, elle fondera le couvent des Oiseaux à Paris et en deviendra la supérieure sous le nom de mère Marie-Euphrasie.
Il est 8h du soir. Voilà l’échafaud. On les fait descendre. Elles chantent toujours : le Salve Regina, le Veni Creator, le Te Deum. Mère Thérèse se tourne vers ses filles et leur demande le renouvellement de leurs vœux de religion.
Le bourreau les décapite tour à tour à la guillotine. Leurs corps sont ensuite jetés dans une fosse creusée dans le jardin de l’ancien couvent de Picpus .
Dix jours plus tard, Robespierre est renversé et la Terreur prend fin .
Le Pape Pie X, reconnaissant le martyr des seize religieuses carmélites, proclama « bienheureuses » les seize Carmélites le 27 mai 1906 .
Dans les années 1990, Jean-Paul II s’étonnait devant Mgr Guy Thomazeau, alors évêque de Beauvais, diocèse dont dépend Compiègne, que les religieuses ne soient pas encore déclarées saintes.
Le 20 janvier 2022, le Pape François a donné son accord pour l’ouverture du procès de canonisation équipollente, c’est-à-dire sans nécessité de miracles, des 16 bienheureuses sœurs carmélites de Compiègne.
Le 18 décembre 2024, le pape François signe le décret approuvant la canonisation des 16 bienheureuses carmélites de Compiègne..
Article à paraitre dans le bulletin municipal de Bourth