Depuis le 20 septembre 2023, l’Assemblée Nationale examine une nouvelle proposition de loi dite «Bien Vieillir» qui vise à inscrire le droit de visite pour les pensionnaires des EHPAD «quelle que soit l’heure». Laurent Frémont, enseignant à Sciences Po Paris et auteur d’un rapport sur le sujet remis au gouvernement le 14 novembre dénonce des situations inhumaines qui perdurent encore aujourd’hui.
Jean-Benoit Harel – Cité du Vatican
Faire du droit de visite dans les EHPAD un droit absolu et fondamental. Telle est l’ambition de la proposition de loi «Bien Vieillir» en cours de discussions actuellement à l’Assemblée Nationale portée par deux députés de la majorité présidentielle, Annie Vidal et Laurence Cristol.
Dans un rapport récemment remis au gouvernement, Laurent Frémont, fondateur de l’association «Tenir ta main», met en exergue l’inhumanité des mesures qui pendant la pandémie de Covid-19 ont consisté à isoler les résidents d’EHPAD (Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes) de leur famille. «L’objet de ce rapport, c’était de donner la parole à tous ceux qui avaient souffert des conditions de gestion de la crise sanitaire en leur donnant la parole» explique-t-il. Ayant lui-même perdu son père pendant la période du confinement en France, Laurent Frémont appelle à une véritable prise de conscience sur «ces traumatismes, notamment sur tous ces deuils escamotés parce que les adieux aux visages ont été interdits, parce que les rites funéraires n’ont plus été assurés et parce que la liberté de conscience et l’accès aux derniers sacrements a été prohibé».
La fin de «restrictions inappropriés»
Depuis 2021, Laurent Frémont et le collectif «Tenir Ta Main» militent pour obtenir un droit de visite pour les patients hospitalisés et pour les résidents en EHPAD. Pour eux, le droit de visite ne doit pas subir de restrictions car «l’EHPAD est le domicile privé du résident et donc il faut qu’ils soit ouvert à toute heure pour que le résident puisse recevoir ses proches». Concrètement, cela pourrait notamment passer par l’obtention d’un code d’accès ou du pass de l’EHPAD.
«On constate encore aujourd’hui des restrictions inappropriées de la part des directeurs» déplore Laurent Frémont «pour des motifs d’ordre sanitaire, mais aussi pour des motifs pratiques comme l’interdiction de visites le matin ou le week end.» En inscrivant le droit de visite dans la loi française, le collectif veut croire à la fin de telles pratiques dans le monde des EHPAD.
A l’horizon 2030 en France, la population des personnes de plus de 65 ans dépassera celle des plus de 15 ans. Le rapport alerte sur la nécessité pour les résidents des EHPAD de continuer à exercer pleinement leurs droits de citoyen, «notamment le droit de mener une vie familiale normale et la liberté d’aller et venir». Le fondateur du collectif «Tenir Ta Main» insiste : «Les EHPAD doivent rester des lieux de vie. Les personnes âgées ne doivent pas être traités comme des citoyens de seconde zone».
Favoriser les liens entre les proches et les institutions
Comme l’a révélé le scandale Orpéa en janvier 2022, certains EHPAD proposent des conditions d’accueil inadaptées voire parfois inacceptables, alors qu’un quart des Français y termineront leur vie. Avec ce droit de visite quasi-absolu, Laurent Frémont espère un changement de perspective dans la manière de penser la fin de vie. Afin de répondre aux situations de maltraitance, son rapport explore également «d’autres mesures, notamment pour favoriser les liens entre les proches et les institutions et aussi pour former tous les personnels à l’accompagnement en fin de vie en soins palliatifs».
Ainsi, Laurent Frémont propose la création d’une instance de médiation entre les institutions et les proches mais également d’une autorité de contrôle qui pourrait faire des visites inopinées dans les établissements ou sur saisine.
Vatican News